Corps de pierre
9.7.11Un corps de pierre. Elle est devenue un corps de pierre depuis que. Depuis que plus rien. Nue. C’est de la sécheresse de vie partout sur sa peau, une peau morte à la rugosité du caillou, endurcie par le manque, séchée de l’envie qui ne coule plus. Des crevasses se sont formées par groupe aux endroits qui autrefois étaient parcourus, touchés par d’autres, hydratés de caresses. C’est sec dans ses mains, la paume en pierre ponce, les ongles durcis par les griffures sur les toits où elle se perchait auparavant, le corps étendu, dans l’attente d’une nuit d’eau. Ses jambes sont dures comme du granit, deux frêles pieux de granit noir, la peau brune devenue couleur ébène d’une forêt abattue, la jungle derrière elle quand ces dernières longilignes affolaient le charmant conquistador. Ses bras sont maigres, collés des os, l’épiderme en berne qui s’accroche aux récifs, opaline et fraîche peau changée en flasque membrane pour muter dans le temps en fossile de chair. Un corps de pierre. Elle est devenue un corps de pierre depuis que.