Ma voisine
26.3.16
Ma voisine est une bonne copine. Une fille pas comme les autres, une petite tête châtain avec des taches de rousseur, des cheveux courts. Elle est toujours habillée avec une paire de jeans larges, un t-shirt de garçon et de vieilles baskets. Nous jouons ensemble, aux cowboys et aux indiens. Elle préfère faire le cow-boy. Elle aime gagner et les indiens perdent toujours. Elle aime aussi faire la folle sur les quais, prés de la rivière, en skate-board ou en patins à roulettes. Rien ne lui fait peur à ma copine.
Je l’invite souvent à dormir à la maison, le mardi soir ou les weekends. Mais elle ne m’invite jamais chez elle, ses parents ne veulent pas. Tu peux inviter des filles si tu veux mais pas un garçon, disent-ils. Pour moi, et mes parents l’ont compris, elle est un copain, comme un autre, comme un garçon, je ne fais aucune différence.
Nous sommes si proches que nous prenons même notre bain ensemble. Mes parents ne sont pas fortunés mais nous avons le privilège d’avoir une baignoire sabot : la moitié d’une vraie baignoire avec un large rebord en guise d’assise et un rideau en plastique pour pouvoir aussi prendre des douches.
Ce soir-là, le froid pique au dehors. Et dans la salle de bains que mes parents ne chauffent jamais, on se déshabille en poussant des cris stridents. A chaque vêtement retiré, le froid nous transperce encore un peu plus, si bien qu’une fois nus comme des vers, nous ne sommes plus que deux congères recroquevillées. Je me glisse le premier derrière le rideau et j’ouvre le robinet.
L’eau coule d’abord comme si elle avait arpenté les couloirs d’un glacier. Elle me rejoint transie et pousse un cri étouffé dés que son pied touche le fond gelé de la baignoire. Elle s’enroule rapidement dans le rideau en attendant une température plus clémente. Quelques secondes de coulée et l’eau se met à cracher une pluie brûlante. La vapeur nous envahit et nos cris se transforment en rires.
A force de tâtonnement, je réussis à régler la température. L’eau devenue bonne, je lui tends la main pour qu’elle me rejoigne. Et là, blottis l’un contre l’autre, nous nous laissons emporter par la tiédeur. Accroupis dans ce réduit, je commence par lui laver le dos, puis les cheveux avec un morceau de savon de Marseille. Elle fait de même après plusieurs retournements périlleux pour ne laisser aucune partie de nos corps sortir à l’air libre et froid. On est bien dans cette eau chaude. La vapeur envahit la pièce comme la brume s’empare d’une clairière et nous n’y voyons plus rien. Nous restons deux heures ainsi blottis l’un contre l’autre, nous ne voulons plus sortir. Mais ma mère nous appelle, c’est l’heure d’aller se coucher. Je tire la bonde de la baignoire et l’eau descend lentement en découvrant nos corps jusqu’au bout de nos orteils flétris.
Elle sort la première, corps filiforme et laiteux, touché de quelques marques rouges de chaleur. Elle s’enroule dans une serviette blanche et je la regarde un instant, émerveillé par la grâce de son geste. Elle bleuit désormais, par les jambes puis les bras, puis le visage et elle claque des dents. Je sors à mon tour et je la frictionne énergiquement pour la réchauffer. Elle enfile une longue chemise de nuit et d’un air joueur, m’invite à vite la rejoindre dans la chambre.
Arrivé près du lit, je ne vois plus que ses cheveux en bataille dépasser de l’édredon moelleux. Je me glisse près d’elle en chahutant. Je ris, lui ébouriffe ses cheveux en la traitant de chèvre. Elle me regarde comme jamais elle ne m’a regardé. Ce soir, elle a ôté sa chemise de nuit. Elle est nue et me le montre en descendant lentement le drap jusqu’à ses pieds. Je rougis. Je ne ris plus. J’avale ma salive et me colle contre son corps chaud et encore humide. Ma main sur son ventre caresse timidement. J’hésite puis me serre et l’enroule en soufflant lentement de l’air chaud dans son cou, dans le cou de ma copine, dans le cou de ma petite copine.