La femme au balcon XXXIV
30.3.22Aujourd’hui, tu es venue sur le balcon. Fumer, toujours. Cigarette en bouche, tu as apporté ton nécessaire pour le soin des pieds. Une petite trousse avec coupe-ongles, lime, coton et vernis. Tu fumes par petits à-coups synchronisés avec le bruit sec de tes ongles qui tombent sur le balcon. Clic et tu tires. Re-clic et tu souffles. Pliée en deux dans une position inconfortable, tu finis par poser la cigarette dans le cendrier. Après avoir limé les angles trop aigus, c’est au tour de la peinture délicate ; tu secoues la petite fiole, en sors le petit pinceau rouge vif et tu t’appliques à le glisser sur chaque ongle. Plonges et peins. Plonges et peins, un bout de langue sorti de ta bouche pour ne pas dépasser comme le ferait un enfant affairé à son dessin.
Plusieurs va-et-vient sur dix orteils qui désormais brillent autant que le bout incandescent de ta cigarette. Tu la termines d’une dernière taffe brûlante. Tes pieds bien posés à plat, tu glisses des petits morceaux de coton entre tes doigts de pied et rentres chez toi en marchant sur les talons tel un canard rejoignant sa mare.